La manière dont on l'interprète (c'est le cas pour toutes les oeuvres) est révélatrice de la façon dont on pense. Avoir peur qu'un enfant pense que les Africains sont des êtres inférieurs à cause de Tintin au Congo, c'est ne pas respecter l'intelligence de tout enfant qui sait lire. Et pour y voir du racisme, il faut déjà avoir l'idée de racisme en tête. Je ne dis pas que c'est anormal d'en voir, Hergé reconnaissant lui-même qu'il était bercé par les préjugés en vigueur dans son milieu à l'époque, mais je dis qu'avec un point de vue actuel, il me semble plus légitime d'interpréter ça comme des critiques envers Tintin que comme une illustration de l'infériorité des Africains. Pour faire un parallèle, quand un réalisateur fait un film dont le héros massacre des gens, l'interprétation légitime n'est généralement pas "le héros massacre des gens, donc c'est bien - il faut interdire ce film car son message est dangereux", mais plutôt "le héros tue des gens, c'est un sale type, et ce film condamne la violence gratuite tout en nous montrant que nous en sommes complice".
Pour interpréter dans l'autre sens ("la violence c'est bien, interdisons ce film"), il faut avoir une attitude passive face à l'oeuvre, une attitude dans laquelle le héros est forcément gentil et où l'auteur/réalisateur approuve les actes du héros. Dans le cas de Tintin au Congo, ça n'était pas le but initial d'Hergé. Soit, mais ce n'est pas pour autant qu'on ne peut pas interpréter l'oeuvre avec notre point de vue actuel et y voir la présentation d'un héros bien pensant, débrouillard, plutôt sympa, mais pas non plus dénué de défauts - un être humain, somme toute

Oscar >> Plusieurs générations, une centaine d'années entre Hergé et Goscinny ?
