Et d'avance mes excuses pour les fautes, j'essaye de limiter la casse.
[Je précise maintenant que j'ai fini la rédaction que je ne dis pas que chez nous c'est tout rose quelque soit le domaine, loin de là, simplement là je trouve qu'ils cumulent beaucoup d'une part et que d'autre part la réalité est peut-être très loin de l'image d'Epinal.]
Cela fait déjà un petit moment que je me pose des questions sur le pays du soleil levant, questions (et idées reçues) qui pourraient se regrouper autour d'une problématique : le Japon est-il un pays si "développé" ? Et derrière, n'y a-t-il pas un problème important de mentalité ?
Je ne perds pas de temps à définir (peine perdue) ce que j'entends par "développé", cela se comprendra implicitement selon les exemples. Par ailleurs une sous-problématique serait "Fait-il bon être japonais ?" ce qui relativise encore la notion de "développé".
Sur les parties qui vous intéressent, n'hésitez pas à me corriger, à compléter, j'espère particulièrement susciter l'intérêt de ceux qui y sont allés et côtoient ou ont côtoyé des japonais autrement que par le biais de JV et mangas.
L'économie :
Commençons par le macro, arrivé en 2009, l'endettement du Japon atteint 160-170% du PIB (<u>avant</u> les plans de relance), le point de repère dans ces cas-là ce sont les 60% pour les pays de la zone euro (respectés en moyenne, sauf exception telle l'Italie avec 100%) ou les quelques 30% des Etats-Unis après Irak et avant plans de relance.
Les milliards de Yen ont été engloutis dans de multiples plans de relance sans effet décisif au cours des années 90, années "maudites" où le moteur Japonais étaient totalement en panne... Moteur qui est sorti de sa torpeur dans les années 2000 sans toutefois convaincre de sa vigueur. Arrive la crise, et là plouf, plongeon, le yen flambe, les exportations se casse la gueule, la production industrielle avec et la bourse vient de revenir 26 ans en arrière !
En cause, encore et toujours une demande intérieure en panne nous dit-on, des nippons qui économisent pour leur retraite et un modèle essentiellement tourné vers l'export que ce soit l'électronique ou les chantiers navals.
Première nuance, je cite le classique "consommation en panne" mais je peux difficilement ne pas le mettre en rapport avec l'image de surconsommateur que l'on a parfois des japonais (du moins de certains) avec notamment une utilisation éphémère des gadgets électroniques poussée à un niveau extrême (temps moyen de détention d'un téléphone ?). Donc consommation en panne ou atteinte d'un plafond...
<b>Social :</b>
Derrière l'économie, l'explication sociale. Une nouvelle génération s'est développée dans les années 90 et, semble-t-il, explose en ce moment : les jeunes précaires. Et encore, de moins en moins jeunes puisque l'on atteint de plus en plus facilement les 35 ans lit-on ici et là. Non seulement le Japon a dit adieu à l'emploi à vie mais il a aussi dit bonjour aux sdf dans ses rues et à découvert (encore à petite échelle semble-t-il) le principe d'entraide porté par les associations.
<b>Industrie :</b>
De formation éco, qu'est-ce que l'on a pu me péter les couilles avec les Japonais et leur Kaizen, juste-à-temps et tout le toutim. De fait, s'il existe certainement un modèle Toyota (réussi), je pense qu'il ne faut pas généraliser à "modèle japonais".
A l'inverse, on oublie trop souvent que le toyotisme repose sur une forte flexibilité (=intérimaire) de la main-d'œuvre, d'où précarisation de celle-ci et probable contribution à l'apparition des nouveaux pauvres cités plus haut.
Et si l'industrie automobile japonaise a eu de nombreux succès, notamment aux E-U, impossible d'oublier que Nissan en pleine déroute fut sauvé par un occidental ou que Mitsubishi n'avait rien à envier à Fiat il y a peu.
Mais parlons d'électronique, l'épouvantail reste Sony qui n'en finit plus de tailler dans ces effectifs, continuant à s'étendre dans le cinéma US alors que son coeur de métier l'électronique n'est toujours pas compétitif. Sauvé par une PS2 increvable et une PSP revenue d'entre les morts, Sony a aussi réussi (tardivement) à revenir sur le marché du LCD mais loin derrière le géant Samsung. Quant aux téléphones, certes ils sont sortis d'affaire, mais il leur aura fallu s'allier à Ericsson.
Je vous laisse compléter ou nuancer le tableau avec les Sharp et autres Matsushita. Apple, l'occidental, a par contre réussi à percer.
Sony encore qui tentera vainement d'imposer l'UMD et Sony enfin qui sera incapable de s'entendre avec Toshiba pour préserver le potentiel du BRD déjà réduit dès le départ.
L'avance technologique dans la fibre optique par exemple et les télécoms en général n'est pas non plus un atout décisif et sert surtout à engraisser un NTT Telecom bien peu entreprenant à l'étranger... J'allais écrire le quasi-monopole NTT mais il semble qu'une vraie concurrence se soit mise en place.
Quant aux banques, si elles ont été plus prudentes sur les subprimes, suite à leur raclée des années 90, elles dérouillent par le système et l'économie japonaise. Je ne connais pas leurs éventuels succès à l'international (avant crise).
Enfin sur le net, là encore j'en sais trop peu, yahoo et google sont en tout cas parmi les premiers moteurs, quid d'amazon et autres ?
Y'a-t-il des acteurs indépendants qui se sont créés et développés ou bien la quasi-totalité reste-t-elle aux mains des grands groupes, notamment banques et télécom ?
<b>Création & Culture</b>
Commençons par les jeux vidéos.
Nous sommes bien placés pour l'observer ici, en matière de JV tout au moins, les japonais sont de plus en plus nombreux à reconnaître qu'ils sont largués par les occidentaux. Si Devil May Cry a montré le chemin, God of War est made in Santa Monica.
Il y a eu une concentration chez les éditeurs mais sans que cela soit couronné d'un succès éclatant. On pourrait même se demander s'ils n'ont pas carrément un problème pour gérer les gros projets, sortir de leurs sentiers battus.
La meilleure métaphore reste pour moi Nintendo qui a préféré se séparer de Rare plutôt que de résoudre le problème. Aujourd'hui bien sûr ils croulent sous le pognon, mais jusqu'à quand ? Ils se sont montrés tout aussi incapables de gérer sereinement Retro Studios alors que MS multiplie les succès récents et les accords malgré un terrain miné.
<b>Je pourrais d'ailleurs évoquer le terrain bloqué de la distribution mais j'en sais trop peu sur le sujet.</b>
Konami avait imposé PES mais EA s'est montré capable de réagir. Du reste, en matière de sport, le bilan est maigre comme dans bien d'autres genres qu'ils dominaient autrefois (course, action-horreur...). Autre signe qui ne trompe pas, les japonais sont les champions toutes catégories du recyclage de vieux jeux, ils vivent sur leurs acquis. Et pendant ce temps les occidentaux, pourtant professionnels de la mise-à-jour et du je-ne-te-mets-pas-cette-bonne-idée-pour-finir-un-chef-d'oeuvre-car-je-préfère-la-garder-pour-un-numéro-deux s'aperçoivent eux aussi qu'ils ont parfois marqué les mémoires (good old games, steam).
D'autre part, je suis aussi perplexe devant l'absence de réussite de petits studios japonais. Il y a quelques années, personne ne connaissait Cryteck, quid d'un équivalent japonais ? Et pourtant on se souvient de l'essaimage organisé par Nintendo à une époque ou aux nombreuses engueulades-création de studios.
Je connais mal la scène indé mais là encore, il semble que le très gros de la troupe soit américain ou européen, ou diable sont passées les petites équipes japonaises ?
En sortant des jeux vidéos, on glisse directement sur les <b>mangas et animés</b>, là encore, j'en sais trop peu mais de ce peu connu, j'ai l'impression que s'est enclenchée depuis quelques années une industrialisation et dérivation des séries, sous le rouleau compresseur Bandaï, qui progressivement tue la poule aux œufs d'or, l'originalité et les francs succès avec. Aux spécialistes de donner leur avis. Il y a quelque chose de frais en ce moment par rapport à 10 ans ? Le Japon est encore capable de sortir un Cowboy Bebop par exemple ? (que je me refais en ce moment
)Y'a-t-il une avant-garde qui se dessine derrière Miyasaki ? Quid du cinéma nippon qui avait eu quelques succès dans l'horreur, du bon ces dernières années ?
Les mangas évoluent-ils à la manière (même moindre) de la révolution de la bande dessinée que nous connaissons (particulièrement en France c'est vrai) ? Je souligne ici la capacité d'absorption et d'inspiration dans un sens et je m'interroge sur la réciproque.
J'arrête là pour la culture, c'est évidemment très réducteur, il y manque en particulier la littérature. Je serais aussi curieux de savoir quelle place tient la télévision telle qu'on la connaît à l'extérieur (des jeux débiles) dans le total, dans ce qui est regardé. Aucune idée non plus de la diffusion des idées sur le net, d'apparition de webjournaux tout comme de l'existence d'une presse indépendante, critique, investigatrice.
Je zappe la notion écologique où j'en sais encore trop peu, d'un côté de grands programmes d'économies d'énergie, des grands de l'électronique qui se comportent de manière contrasté, de l'autre une société qui adore (toujours ?) le jetable, Nintendo qui se bats les miches des appels de Greenpeace... et une chasse à la baleine sans états d'âme.
D'ailleurs pour bien clôturer sur la culture et enchaîner sur la politique étrangère (le point noir de Junichiro Koizumi), il faut aussi citer cet autisme répété vis-à-vis de ses voisins (quelques améliorations...) et de son histoire, je pense que la mention de "sanctuaire de Yasukuni" résume bien le problème... Encore faut-il y rajouter des achats massifs d'armements et un renoncement à la doctrine pacifique dont je ne sais s'il s'est finalement concrétisé.
Je vais certainement trop loin mais, peut-être est-ce un biais occidental, j'attendrais d'une des plus grandes puissances mondiales et, a priori, d'une démocratie qu'elle joue le rôle de phare dans une région, plutôt que de laisser pourrir les controverses alors que son principal adversaire régional ne cesse de gagner en puissance.
Même en se torchant avec les droits de l'homme, stratégiquement, c'est très mal joué de ne pas avoir profiter de sa puissance des années 80, et encore depuis, pour tisser des liens dans toute l'Asie du sud-est.
<b>Bref, sur ce gros tas d'à peu près, de connaissances limitées et de subjectivité, je vous pose ma thèse pour faire la transition avec mon dernier paragraphe.</b>
Le sentiment que j'en ai en lisant ici et là c'est que l'on a bien trop sous-estimé la faiblesse de l'état japonais et de l'immobilisme des structures. Mon diagnostic c'est que la tête est malade mais je me demande si les jambes peuvent répondre.
Oui ou non existe-t-il une société civile au Japon ? Y'a-t-il des causes qui créent des débats sortant d'un cercle d'initiés ? Y'a-t-il une réelle liberté d'entreprendre ou bien les circuits de distribution, les forces en présence (conglomérats tentaculaires s'ils sont toujours d'actualité ?) bloquent-ils toute possibilité d'initiative ?
Oui ou non les femmes réussissent-elles à s'émanciper ? Sont-elles un certain nombre à sortir du rôle de potiche/jeune fille/mère au foyer que les japonais semblent tant aimer ?
Quelle gueule a la démocratie au Japon ? Existe-t-elle ou y'a-t-il un renoncement face à la puissance des grands groupes et de certains de leurs marionnettistes de l'ombre ?
Toute grande puissance qu'il est le Japon n'en demeure pas moins un incapable chronique dans le renouvellement ses élites politiques, le même parti et tous ses copains étant au pouvoir depuis 50 ans malgré des déboires sans fin (Koizumi n'ayant été qu'une parenthèse entre mauvais finalement et son bilan n'est pas blanc), le premier ministre actuel explosant les limites de la nullité et d'impopularité, sans parler de l'ivrogne récemment débarqué.
Las, au moment même où l'opposition (qui a pris le Sénat récemment) allait enfin prendre le pouvoir lors des prochaines législatives, son chef se voit (soudainement) mouillé dans une affaire de détournement de fonds.
C'est une coïncidence bienvenue pour le parti historique mais d'autant plus facile à faire apparaître si elle a un fond de vérité... Comment d'ailleurs s'en étonner dans un pays où les yakuzas semblent faire partie du décor.
Alors docteurs, c'est grave ?
)
Puis bon si tu prends carrément les 10 dernières années, y a pas mal de séries d'excellentes qualités qui sont sorties 
