Ça y est : Bruno Bonnell a été viré !
Publié : 05 avr. 2007 10:41
Un petit pas pour l'homme (enfin un bon coup de pied au cul) et un grand soulagement pour Infogrames.
Petit rappel des faits subjectif et sélectif (mais pas trop quand même) : Bonnell a confondé Infogrames il y a une plombe maintenant (20 ans ?), premiers succès avec des déclinaisons de bandes dessinées dont il est fan et notamment Astérix sur Super Nes.
Rapidement le lyonnais Infogrames devient un groupe dont les productions déclinent en qualité mais augmente en quantité, il devient le champion des adaptations rapides de licences (Warner Bors notamment), sortant 60, 80 jeux voire plus par an (hors multiplateforme).
Fin 90's, bulle internet, Bonnell perd définitivement la tête et son ego devient totalement démesuré, il se lance dans des rachats outre-atlantique. Des studios prestigieux mais peut-être moins solides financièrement, ou trop naïfs, se laissent prendre. Notamment le feu légendaire Interplay, l'auteur des Fallout qui ont marqué une génération de PCistes.
Infogrames avalera aussi le studio Shiny qui il y a quelques années était reconnu comme un vrai puit d'originalité (Earthworm jim). Ils avaient d'ailleurs récupéré la licence Matrix (et s'était fait racheté entre temps par d'autres connards, français, les patrons de Titus, studio qui a stoppé ses activités il y a quelques années par une belle faillite.). Problème, vous pourrez avoir les meilleurs talents dans un studio, si vous ne leur donnez pas de budget et leur mettez la pression, ils accouchent d'une merde : enter the matrix.
Dernier gros rachat notable du jean-marie messier du jeu vidéo : les licences d'hasbro, le géant du jouet américain. Voilà infogrames seul maître des licences monopoly et trivial pursuit !
N'importe qui de sérieux aurait crié à la folie mais pas Bonnell qui se félicitait de racheter tout ça avec un montage financier très risqué qui s'est finalement transformé en une énorme dette. Bonnell lui est fier de passer la plupart de son temps aux Etats-Unis.
Ses grands actionnaires (on a vu Dassault (aviation & armement) et Eurazeo (fonds d'investissement) au capital) ne prêtent pas attention à des participations mineures pour eux et quittent le navire.
Quelques années passent, le chiffre d'affaires qui avait frôlé (ou atteint ?) le milliard d'euros décline rapidement, les licences sont vendues pour éponger les dettes. On comprend qu'en réalité Bonnell est un mégalo qui veut absolument tout contrôler ce qui fait qu'il paralyse totalement son entreprise qui réalise 60-65 % de son activité hors d'Europe.
Ce merveilleux patron va bien tenter de nous sortir des solutions miracle, parfois très visionnaires mais jamais réalistes. Alors un jour infogrames va se sauver en faisant fortune sur Internet, un jour sur les téléphones portables, un jour c'est "éditeur mondial", un jour c'est "un distributeur majeur". Un coup on se recentre sur les productions internes, un coup sur l'édition de projets externes.
Quelques jeux limitent la casse, ainsi Matrix, poussé par une puissance marketing, et une attente du public énorme, va atteindre les 6 millions d'unités vendues en quelques semaines seulement... Seulement le titre est mauvais, le président de la branche jeux vidéos de Warner critique publiquement la gachis de la licence. Avec raison, la suite sortie 2-3 ans plus tard et plus correcte cette fois, fera un four monumental : la licence est morte.
Enivré par Matrix qui l'a sauvé de la banqueroute, Bonnell veut retenter le même coup avec Driver 3. Entre temps (ou peu après), il demande une rallonge à ses actionnaires en jurant ses grands dieux que c'est la dernière fois et qu'après tout ira bien.
Driver 3 sort, plan marketing énorme, les ventes partent fort mais encore une fois, la pauvre équipe n'a pas pu faire grand chose, le jeu a des idées mais n'est pas terminé, bourré de bugs il est vite descendu par la presse qui n'a plus désormais aucun remord à tirer sur l'ambulance. Les ventes plafonnent à 3 millions là où tous les fans du 1er épisode savaient qu'un remplaçant à GTA était tout à fait envisageable.
Faute de nouveau miracle à la Matrix, Infogrames est contraint de vendre les bijoux de famille, Driver part, Unreal est perdu depuis longtemps, la liste serait longue.
Reste Donjons et Dragons, là encore une licence forte, un possible concurrent solide pour World of Warcraft. Seulement face à Blizzard, un "bon" jeu (déjà un exploit pour Infogrames) ne suffit pas, les ventes restent très moyennes.
Je n'en ai pas parlé avant, j'aurais du, pendant cette descente aux enfers, les plans de "réorganisations" se multiplient. Bonnell est même apprécié par les financiers, avec son look de déménageur, cette bande de couilles molles croient voir en lui un homme d'action capable de rentabiliser ses acquisitions.
La réalité est toute autre, les développeurs français ou américains sont virés, les talents partent souvent d'eux-mêmes lorsqu'ils en ont la possibilité.
Parmi les rares pépites restantes (rappelons qu'on est parti d'une petite boîte de passionnés), on trouve Eden Games qui réussira à sortir un Test Drive Unlimited pas loin d'être un vrai hit mais là encore, le jeu n'est pas fini, problème de stabilité sur le net qui devait être son atout principal, coup marketing irréfléchi aux Etats-Unis qui tue dans l'oeuf l'aura du jeu (bradé à 40$ sur XBox 360, les américains ont cru que c'était le seul moyen pour Infogrames d'écouler sa dernière merde).
Plus de développeur, plus de licence, 5 ou 6 exercices fiscaux déficitaires consécutifs (là où de grands patrons se font virer dès que les profits sont moins importants qu'annoncés), une entreprise qui en bourse ne vaut plus rien et a encore une montagne de dettes... Et rajoutons aussi une dépendance énorme vis-à-vis de Bandaï qui développe la dernière vache à lait d'Infogrames : Dragon Ball Z.
Les actionnaires sont une dernière fois appelés à la rescousse mais cette fois-ci ils (pas les mêmes qu'au départ hein) reprennent le pouvoir comme on le voit aujourd'hui. Une fois les comptes ré-équilibrés, même provisoirement, de nouveaux fonds sont montés tranquillement au capital (pour un prix dérisoire) et ont pris place au conseil d'administration : Bonnell est viré.
Le nouveau patron ne venant pas du jeu vidéo (mais de Noos, c'est vous dire si on peut avoir confiance...) on peut encore craindre des jeux pas géniaux. Mais très probablement, les nouvelles personnes en place sauront plus comprendre quand elles doivent laisser les développeurs faire leur boulot... Pour les développeurs qui restent.
EDIT : j'avais oubilé un détail, en bourse l'action prend 20% ce jeudi 5 avril :
http://www.boursorama.com/cours.phtml?symbole=1rPIFG
Cercle Finance le 05/04/2007 08h11
Infogrames: Patrick Leleu nommé Président Directeur Général.
(Cercle Finance) - Infogrames Entertainment a annoncé ce jeudi la nomination de Monsieur Patrick Leleu au poste de Président Directeur Général du Groupe suite au Conseil d'Administration réuni le 4 Avril 2007.
Patrick Leleu succèdera à Monsieur Bruno Bonnell Président Fondateur d'Infogrames. Bruno Bonnell quitte ses fonctions de Président Directeur Général et administrateur d'Infogrames Entertainment et l'ensemble de ses fonctions au sein d'Atari Inc.
Administrateur d'Infogrames depuis janvier 2007, Patrick Leleu a été au cours de sa carrière Directeur Général de Bouygues Telecom depuis son lancement jusqu'en 2001 et ensuite Président Directeur Général de NOOS (opérateur de réseaux câblés) entre 2001 et 2005.
' Depuis plusieurs années, Infogrames était engagé dans un plan de restructuration de la dette globale, qui s'est achevé avec succès en mars 2007 permettant au groupe de bénéficier d'une situation financière assainie, pour engager une nouvelle phase de développement. Le Conseil d'Administration, en accord avec Bruno Bonnell, a estimé qu'il s'agissait du moment opportun pour créer une nouvelle dynamique. ' a précisé le groupe dans son communiqué.
Copyright (c) 2006 Cercle
Petit rappel des faits subjectif et sélectif (mais pas trop quand même) : Bonnell a confondé Infogrames il y a une plombe maintenant (20 ans ?), premiers succès avec des déclinaisons de bandes dessinées dont il est fan et notamment Astérix sur Super Nes.
Rapidement le lyonnais Infogrames devient un groupe dont les productions déclinent en qualité mais augmente en quantité, il devient le champion des adaptations rapides de licences (Warner Bors notamment), sortant 60, 80 jeux voire plus par an (hors multiplateforme).
Fin 90's, bulle internet, Bonnell perd définitivement la tête et son ego devient totalement démesuré, il se lance dans des rachats outre-atlantique. Des studios prestigieux mais peut-être moins solides financièrement, ou trop naïfs, se laissent prendre. Notamment le feu légendaire Interplay, l'auteur des Fallout qui ont marqué une génération de PCistes.
Infogrames avalera aussi le studio Shiny qui il y a quelques années était reconnu comme un vrai puit d'originalité (Earthworm jim). Ils avaient d'ailleurs récupéré la licence Matrix (et s'était fait racheté entre temps par d'autres connards, français, les patrons de Titus, studio qui a stoppé ses activités il y a quelques années par une belle faillite.). Problème, vous pourrez avoir les meilleurs talents dans un studio, si vous ne leur donnez pas de budget et leur mettez la pression, ils accouchent d'une merde : enter the matrix.
Dernier gros rachat notable du jean-marie messier du jeu vidéo : les licences d'hasbro, le géant du jouet américain. Voilà infogrames seul maître des licences monopoly et trivial pursuit !
N'importe qui de sérieux aurait crié à la folie mais pas Bonnell qui se félicitait de racheter tout ça avec un montage financier très risqué qui s'est finalement transformé en une énorme dette. Bonnell lui est fier de passer la plupart de son temps aux Etats-Unis.
Ses grands actionnaires (on a vu Dassault (aviation & armement) et Eurazeo (fonds d'investissement) au capital) ne prêtent pas attention à des participations mineures pour eux et quittent le navire.
Quelques années passent, le chiffre d'affaires qui avait frôlé (ou atteint ?) le milliard d'euros décline rapidement, les licences sont vendues pour éponger les dettes. On comprend qu'en réalité Bonnell est un mégalo qui veut absolument tout contrôler ce qui fait qu'il paralyse totalement son entreprise qui réalise 60-65 % de son activité hors d'Europe.
Ce merveilleux patron va bien tenter de nous sortir des solutions miracle, parfois très visionnaires mais jamais réalistes. Alors un jour infogrames va se sauver en faisant fortune sur Internet, un jour sur les téléphones portables, un jour c'est "éditeur mondial", un jour c'est "un distributeur majeur". Un coup on se recentre sur les productions internes, un coup sur l'édition de projets externes.
Quelques jeux limitent la casse, ainsi Matrix, poussé par une puissance marketing, et une attente du public énorme, va atteindre les 6 millions d'unités vendues en quelques semaines seulement... Seulement le titre est mauvais, le président de la branche jeux vidéos de Warner critique publiquement la gachis de la licence. Avec raison, la suite sortie 2-3 ans plus tard et plus correcte cette fois, fera un four monumental : la licence est morte.
Enivré par Matrix qui l'a sauvé de la banqueroute, Bonnell veut retenter le même coup avec Driver 3. Entre temps (ou peu après), il demande une rallonge à ses actionnaires en jurant ses grands dieux que c'est la dernière fois et qu'après tout ira bien.
Driver 3 sort, plan marketing énorme, les ventes partent fort mais encore une fois, la pauvre équipe n'a pas pu faire grand chose, le jeu a des idées mais n'est pas terminé, bourré de bugs il est vite descendu par la presse qui n'a plus désormais aucun remord à tirer sur l'ambulance. Les ventes plafonnent à 3 millions là où tous les fans du 1er épisode savaient qu'un remplaçant à GTA était tout à fait envisageable.
Faute de nouveau miracle à la Matrix, Infogrames est contraint de vendre les bijoux de famille, Driver part, Unreal est perdu depuis longtemps, la liste serait longue.
Reste Donjons et Dragons, là encore une licence forte, un possible concurrent solide pour World of Warcraft. Seulement face à Blizzard, un "bon" jeu (déjà un exploit pour Infogrames) ne suffit pas, les ventes restent très moyennes.
Je n'en ai pas parlé avant, j'aurais du, pendant cette descente aux enfers, les plans de "réorganisations" se multiplient. Bonnell est même apprécié par les financiers, avec son look de déménageur, cette bande de couilles molles croient voir en lui un homme d'action capable de rentabiliser ses acquisitions.
La réalité est toute autre, les développeurs français ou américains sont virés, les talents partent souvent d'eux-mêmes lorsqu'ils en ont la possibilité.
Parmi les rares pépites restantes (rappelons qu'on est parti d'une petite boîte de passionnés), on trouve Eden Games qui réussira à sortir un Test Drive Unlimited pas loin d'être un vrai hit mais là encore, le jeu n'est pas fini, problème de stabilité sur le net qui devait être son atout principal, coup marketing irréfléchi aux Etats-Unis qui tue dans l'oeuf l'aura du jeu (bradé à 40$ sur XBox 360, les américains ont cru que c'était le seul moyen pour Infogrames d'écouler sa dernière merde).
Plus de développeur, plus de licence, 5 ou 6 exercices fiscaux déficitaires consécutifs (là où de grands patrons se font virer dès que les profits sont moins importants qu'annoncés), une entreprise qui en bourse ne vaut plus rien et a encore une montagne de dettes... Et rajoutons aussi une dépendance énorme vis-à-vis de Bandaï qui développe la dernière vache à lait d'Infogrames : Dragon Ball Z.
Les actionnaires sont une dernière fois appelés à la rescousse mais cette fois-ci ils (pas les mêmes qu'au départ hein) reprennent le pouvoir comme on le voit aujourd'hui. Une fois les comptes ré-équilibrés, même provisoirement, de nouveaux fonds sont montés tranquillement au capital (pour un prix dérisoire) et ont pris place au conseil d'administration : Bonnell est viré.
Le nouveau patron ne venant pas du jeu vidéo (mais de Noos, c'est vous dire si on peut avoir confiance...) on peut encore craindre des jeux pas géniaux. Mais très probablement, les nouvelles personnes en place sauront plus comprendre quand elles doivent laisser les développeurs faire leur boulot... Pour les développeurs qui restent.
EDIT : j'avais oubilé un détail, en bourse l'action prend 20% ce jeudi 5 avril :
http://www.boursorama.com/cours.phtml?symbole=1rPIFG
Cercle Finance le 05/04/2007 08h11
Infogrames: Patrick Leleu nommé Président Directeur Général.
(Cercle Finance) - Infogrames Entertainment a annoncé ce jeudi la nomination de Monsieur Patrick Leleu au poste de Président Directeur Général du Groupe suite au Conseil d'Administration réuni le 4 Avril 2007.
Patrick Leleu succèdera à Monsieur Bruno Bonnell Président Fondateur d'Infogrames. Bruno Bonnell quitte ses fonctions de Président Directeur Général et administrateur d'Infogrames Entertainment et l'ensemble de ses fonctions au sein d'Atari Inc.
Administrateur d'Infogrames depuis janvier 2007, Patrick Leleu a été au cours de sa carrière Directeur Général de Bouygues Telecom depuis son lancement jusqu'en 2001 et ensuite Président Directeur Général de NOOS (opérateur de réseaux câblés) entre 2001 et 2005.
' Depuis plusieurs années, Infogrames était engagé dans un plan de restructuration de la dette globale, qui s'est achevé avec succès en mars 2007 permettant au groupe de bénéficier d'une situation financière assainie, pour engager une nouvelle phase de développement. Le Conseil d'Administration, en accord avec Bruno Bonnell, a estimé qu'il s'agissait du moment opportun pour créer une nouvelle dynamique. ' a précisé le groupe dans son communiqué.
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